Que la grand-mère se suicide, déjà ça la fout mal. Mais qu'en plus elle se rate, c'est vraiment manquer de bol. Chez les Ding, on espère son séjour à l'hôpital aussi bref que fatal. Ils sont sept personnes à se partager vingt mètres carrés, soit quatre générations sous un même toit : ce n'est beau que dans un roman de Lao She. On est dans un roman chinois contemporain, et la vieille pue!
Chez Fang Fang (née en 1955, ouvrière pendant la révolution culturelle) ...les personnages résistent au traitement corrosif. Tandis qu'elle agonise, la vieille dame survole le paysage accidenté de son existence.

J'ai découvert Fang Fang avec "Une vue splendide" qui m'avait littéralement surprise et enthousiasmé de par son ton acerbe, mordant et caustique. "Soleil du crépuscule" n'est pas en reste !

Toujours cette verve et ce regard acéré sur les petits travers humain, et toujours beaucoup de poésie dans ce regard que nous offre sur l'auteure sur la vie.

Une fois encore, on flirte avec la mort, sans mélodrame, mais avec réalisme, un réalisme crû et dur, mais aussi piquant et burlesque parfois. La famille Ding n'est- elle pas semblable à bon nombre d'autres, avec ces qualités et ces travers ? Et la mesquinerie d'un côté et la médiocrité de l'autre vont conduire à une situation échappant à tout contrôle, et aux conséquences dramatiques...

J'aime l'absence de complaisance de Fang Fang envers ses personnages dont elle nous campe avec brio les qualités et les défauts. Tour à tour on aime, on prend en pitié et on exècre la grand-mère Ding, tout comme on suit Chengcheng avec beaucoup de tendresse mais parfois aussi avec un énorme de le secouer! Seul Rulong fera l'unanimité dans une détestabilité dont il n'est pas difficile de penser qu'elle est liée à son statut et sa situation sociale : l'argent comme nouveau cœur de l'être humain...?

Fang Fang excelle aussi toujours à nous donner une vision de la pauvreté sans misérabilisme mais nous amène même dans des moments de souvenirs hautement colorés et/ou poétiques...*clap*

Les deux personnages féminins de la belle fille "débauchée" (réaliste ?) à la jeune adolescente sont aussi terrifiants de justesse... Oui le monde n'est pas romantique, tout n'y est pas merveilleux et les contraintes du quotidien et du manque d'argent ont aussi leur importance.

En résumé beaucoup de truculence, de poésie et un regard ô combien acéré, le tout servi par une écriture d'une simplicité redoutablement efficace : on se laisse embarquer dans cette chronique familiale, en oscillant entre rires, surprises, révoltes et surtout beaucoup de réflexions qui me viennent sur la vie, la mort, la famille...notre place à chacun-e et nos lien et rapports avec les autres...

Bref, une grande auteure que Fang Fang !

Soleil du Crépuscule - FANG Fang

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